Fabienne Morand

Fabienne Morand

Journaliste RP Freelance, Vaud, Suisse

Agriculture

Du colza suisse pour des chips

CULTURE Zweifel a choisi de frire ses chips avec de l’huile de colza plutôt que de tournesol. Une décision qui influence la région.

Article paru le 8 mai 2018 dans La Côte. Textes: Fabienne Morand. PDF

Depuis quelques semaines le jaune des fleurs de colza illumine la région. Bientôt il laissera sa place aux graines, noires, qui donneront de l’huile. Si les semailles, la floraison ou la récolte ne permettent pas de distinguer le colza classique du colza HOLL, l’huile qui en sera extraite aura deux usages différents.

En effet, la classique est utilisée «essentiellement comme huile de salade, car riche en Oméga 3»; la HOLL, «riche en Oméga 9, supporte les hautes températures et sera plutôt utilisée pour la friture», explique David Käser, délégué à la Fenaco, coopérative agricole qui appartient à quelque 200 magasins Landi. En raison de ces différences, «il faut une distance d’au minimum 50 mètres entre une parcelle de colza HOLL et une de classique, afin de ne pas avoir de pollinisation croisée, ce qui pourrait péjorer la qualité», précise Pierre-Yves Perrin, de la Fédération suisse des producteurs de céréales (FSP).

Une culture en expansion
Ce n’est qu’au début des années 2000 que les variétés de colza HOLL (High Olei Low Linolenic) sont apparues. «Avant les années 1970, les graines de colza comportaient des substances indésirables pour des denrées alimentaires et fourragères», explique la FSP. Grâce à des sélections de variétés spécifiques, le colza est devenu un produit consommable. Aujourd’hui, «la traçabilité de l’huile de colza suisse est assurée de la bouteille jusqu’au champ», affirme la FSP.

Colza et sel suisse pour les chips Zweifel
C’est une amélioration de la qualité, de sa popularité auprès des consommateurs et de sa traçabilité qui ont décidé Zweifel a arrêter de produire, en novembre 2017, ses chips et snacks à base d’huile de tournesol pour la remplacer par celle de colza. «L’utilisation d’huile de colza HOLL nous permet de couvrir la totalité de nos besoins avec la production suisse, ce qui n’était malheureusement pas le cas avec l’huile de tournesol», précise Anita Binder, cheffe de projet relations médias chez Zweifel.

COLZA CHIFFRÉ
24 000 hectares, soit les surfaces suisses de colza pour la récolte 2018.
40% le rendement moyen en huile. Autrement dit, 100 kg de graines de colza donnent environ 40 litres d’huile.
4700 tonnes de colza récoltées par an, en moyenne, à Landi La Côte. Soit environ 300 t à Bussy-Chardonney et 1700 t à Eysins. Le colza HOLL en représente environ le 60%.
26% c’est la part de marché de l’huile de colza en Suisse en 2014. L’huile de tournesol est en tête avec 33% et l’huile de palme figure en troisième position avec 17,5%.

Annuellement, le site de production à Spreitenbach (AG) utilise environ 2500 tonnes d’huile de colza HOLL. Par la même occasion, le sel des Alpes suisses, issu des Salines de Bex, a remplacé le sel marin pour favoriser encore plus les matières premières du pays.

Du classique au HOLL
Un changement qui a un impact sur la production de cette plante. Ces dernières années, la progression du colza HOLL a été importante, «renforcée en 2017 avec Zweifel, sans pour autant se faire au détriment du colza classique», continue Pierre-Yves Perrin. «Le contingent national de production de colza pour 2018 a augmenté de 10%, soit environ 10 000 tonnes de colza HOLL», chiffre quant à lui le délégué Landi SA chez Fenaco, David Käser.

Une évolution qui impacte notre région. En effet, les responsables du site Landi Bussy-Chardonney réfléchissent à ne réceptionner, dans un avenir proche, que du colza HOLL. Ils en ont d’ailleurs déjà informé les producteurs concernés. Les agriculteurs qui ont pour habitude de livrer leur colza classique à Bussy-Chardonney, devront soit rouler jusqu’à Penthalaz (qui réceptionne du HOLL pour la première fois en 2018) ou au collecteur d’Essertines-sur-Rolle. L’autre option pour éviter les longs trajets est de semer uniquement du HOLL. Ce qui nécessite qu’un quota leur soit attribué, car ne sème pas du colza, classique ou HOLL, qui veut.


QUELQUES INFORMATIONS SUR LA PLANTE DE COLZA
De la famille des crucifères, comme la moutarde, le colza est le fruit d’un croisement entre un chou et une navette. La plante peut atteindre 2m de haut et produit environ 1400 graines, sachant que 1000 graines pèsent en moyenne 5 grammes. Le rendement souhaité est de 3500 kg/ha, soit environ 50 plants par m2. Le semis s’effectue de fin août à début septembre. Le colza est en fleurs en avril-mai et la récolte s’effectue à la mi-juillet. En Suisse, les agriculteurs reçoivent un contrat où est spécifié le nombre d’hectares de colza qu’ils peuvent semer chaque année. Celui-ci est calculé en fonction de la demandes des transformateurs (huileries). En 2016, le prix de 100 kg d’huile était de 255 francs et les producteurs ont touché quelque 76 francs/100kg. A relever aussi que la «Confédération soutient le colza pour une contribution spécifique à la surface (700 francs/ha)», précise la Fédération suisse des producteurs de céréales de qui proviennent toutes ces informations.